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Charles-Catherine Claude | Femmes séropositives | Génération sacrifiée, 20 ans après | Hommage aux disparus | Rap et hip-hop

Hommage à une combattante (1/8) : Sérovolution

22 mars 2011 (papamamanbebe.net)

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Début du son.

Slam de Catherine Charles : Sérovolution

Trève de rêves et de songes au pays du sida et du mensonge Englouti dans le lit ou dans les flots de la diarrhée sociale / T’as atteins le but et le bout du rouleau / baillonné par le corps médical Plus un bout de papier / pour torcher le cul de leurs phrases terminales / Ton virus est côté en bourse vénéré / cet enfant du dieu ultra libéral / Apologie des labos des lobbies d’leurs lubies d’ leurs logos Cd4 et cac quarante c’est l’impôt de la souffrance prélevé sur ton dos // Tu consommes tu consumes rassuré / par tes allocs ton rmi ou ta coto / oubliant qu’au premier tour du vote / tu paieras tes médocs et l’ hosto / C’est vite arrivé 2007 / Ou tu t’bats ou tu acceptes / Ou tu tapes ou tu t’abaisses / ou tu clash ou tu t’affaisses/ Levez les mains courantes en l’air / al capote a débarqué Dans les cités dans les cimetières / l’immigration a payée : Plein tarif au sida / c’est pour ça qu’si on s’bat pas On ira toujours plus bas / de Caribe en Sylla / Sans combivir sans kalétra sans épivir ou sustiva / Pendant qu’ le marais s’étend, s’étale s’amuse et s’étreint / y’a ma fille qui s’éteint J’peux pas le laisser s’laver les mains / en m’disant c’est le mektoub ou le destin / Dans le labo à cobayes où nous sommes / y’a des souris et peu d’ hommes Des peurs des crics / car l’auto censure l’essentiel / et le parking sonne / Immunité ou humanité déficientes c’est ainsi / la claque sonne aussi / Sexe sans protection tu vas tout droit en prison / diabolisation d’la contamination / T’es pourtant à deux sur la question / c’est pas marqué sur ton front // France europe express si t’es contagieux on t’oppresse / en soins agressifs ou intensifs tu paies cher / loi Kouchner passée au karcher/ Y’a qu’les malades comme Papon qui sortent de prison / funeste oraison pour funèbre horizon / face à la paupérisation /Pour survivre au sida / Y’ pas cinquante solutions / C’est tu veux ou tu veux pas / Tu pleures sur ton sort ou tu combats // Partout du pareil au pire de Douala à Bouji de Dakar à Paris / Plus de trithérapies c’est la mort de m’sieur gratuit Plus ardu que prévu / si on t’fait payer ton azt ou ton subu Tu subis ou tu t’bats / tu abdiques si tu crois / A la sécurité de tes acquis / ou qu’c’est grâce à la sécu / qu’tu vas r’charger tes batt’ries ou tes accus // Politique soporifique du pouvoir des paillettes et du fric / C’est la valeur ou la couleur de l’argent / contre la douleur et l’ardeur de l’urgent / pathogène ou non / / immigration ou prophylaxie/ ils t’ont choisi tu les subis / l’égalité des chances en France aujourd’hui / c’est génuflexions à outrance / devant le pouvoir établi / un p’tit mot pour le médef et la bourse mine de rien / qui trop embrasse mal étreint / qui trop EMBRASE MAL ETEINT / Ou tu fumes ou tu crapotes / ou tu vis ou tu capotes / Seule sérosolution / la sérovolution /

Fin du son.

Sandra : C’était Catherine Charles. Un slam de Catherine Charles qui a pour titre Sérovolution. C’était lors de l’émission du 13 juin 2006, l’émission numéro 279. Ali je vais te demander tout d’abord, après avoir entendu ce slam, qu’est-ce que tu as ressenti, à travers ce slam comment tu vois Catherine Charles et je vais te demander aussi, la première fois que tu l’as rencontrée, que tu as entendu parler d’elle c’était quand ?

Ali : En fait il y a beaucoup de hasard. C’est la première fois que j’écoute ce texte et il me parle de A à Z. Secondo, le hasard fait que je l’ai rencontrée lors d’une précédente émission, il y a plusieurs mois, justement dans les anciens locaux de FPP, donc ici même si on peut dire. Et j’avais déjà remarqué que c’était une personne engagée qui avait énormément de vocabulaire, qui avait l’art de la rhétorique, qui savait ce qu’elle disait, qui avait la tête sur les épaules, qui dénonçait beaucoup de choses qui dérangent. Mais elle le faisait déjà il y a des années et malheureusement ça se fait de moins en moins. Il y en a qui essaye de faire de leur mieux. En tout cas, ce n’est pas les politiques. Ce qu’elle dénonçait à l’époque, ça se dénonce encore aujourd’hui. Et voilà, elle est encore là pour en parler malgré le fait qu’elle soit décédée.

Sandra : Tu dis que ce slam te parle de A à Z pourquoi ?

Ali : Parce que c’est exactement la manière dont étaient traités non seulement les hommes, les femmes, les enfants, toutes les personnes qui ont été traitées, qui ont eu cette pathologie, ont été considérées, pas comme des citoyens de seconde zone, carrément comme s’ils n’existaient plus. On avait qu’une hâte, c’est qu’ils crèvent. Moi parfois dans les consultations, j’ai eu à dire est-ce que je devrais culpabiliser d’être encore en vie ? Donc, on imagine le combat que des millions de personnes ont pu mener en plus en étant mères, en étant parents, je ne sais quoi, de mener une vie avec le virus dans le sang, et en face un gouvernement qui ne fait strictement rien. Au contraire, qui ne fait qu’enterrer les gens, qui on dirait, qu’ils ont qu’une hâte, c’est que les gens décèdent ou tant qu’ils consomment leurs produits, leurs traitements, on dit que c’est eux qui les maintiennent ,ces gens-là en vie, mais voilà. Ce n’est pas chiffrable, ce n’est pas quantifiable et c’est toujours eux qui ont le dernier mot malheureusement.

Sandra : Ben, est-ce que tu as connu Catherine Charles ?

Ben : Oui Catherine, il y a très longtemps. Je l’ai rencontrée, j’ai eu l’occasion de la revoir à travers le combat du Comité des familles. Je suis très touché de son départ. Mais par rapport au slam que j’entends, je vois qu’elle est déjà dans la réflexion sur l’accès au soin qui est remis en question. Aujourd’hui pour se soigner il va falloir payer. Au niveau de la prison, on n’est pas tous égaux. Effectivement avec la loi Kouchner il faut s’appeler Papon pour pouvoir sortir de prison. C’est toutes les choses comme ça qu’elle a dénoncé bien souvent avant les autres. Elle avait un franc parlé qui était égal à elle-même et qui en a fait une militante, une combattante qui faisait peur aussi à certaines associations qui ne voulaient pas trop de vagues. Et voilà tout simplement, une grande pensée pour elle et puis je pense que le combat continue. Et à chaque fois que j’ai pu faire appel à elle, elle a répondu présent, parce qu’elle a vécu ce que nous on a vécu dans les cités ou en prison. Elle l’a vécu depuis l’intérieur et le virus aussi, elle l’a vécu de l’intérieur. C’est ce qui a fait sa force et ses forces de conviction.

Sandra : Zina, est-ce que tu as connu Catherine Charles ?

Zina : Non je ne l’ai pas connue. J’avais entendu parler d’elle. Il y a deux ans, je crois quelque chose comme ça, j’étais venue à une émission de radio et elle avait participé, mais c’était par téléphone. Donc je ne l’ai jamais rencontrée en fait.

Sandra : Est-ce que le slam t’a parlé comme Ali disait, que ça lui parle de A à Z. Est-ce que toi, ce slam te parle ou pas ?

Zina : Bah pareil comme on dit Ali et Ben.

Sandra : Tina, est-ce que tu as connu Catherine Charles ?

Tina : Oui, je l’ai rencontrée plusieurs fois dans le cadre du Comité. Soit à des fêtes de l’association ou bien à l’émission de radio. C’est une dame que j’ai beaucoup appréciée. En plus, elle a l’âge d’être ma mère. C’est une blonde, je sais qu’elle a une fille de mon âge. Il y a des choses comme ça... toujours quand on se voyait elle allait aussi beaucoup vers moi. En tout cas, je l’appréciais beaucoup. J’ai toujours trouvé qu’elle était une dame très franche et vraiment intelligente dans ses paroles. Et aussi je me rappelle, quand il y a eu cette histoire de l’évasion de son fils Christophe Khider, les médias se sont rués sur elle et on la voyait tout d’un coup comme une personne people dans toutes les émissions. Elle, elle savait pourquoi elle venait. Elle avait un vrai combat, elle ne se laissait pas utiliser juste comme people pour faire monter le nombre d’auditeurs, mais elle savait qu’elle se battait pour les conditions dans la prison. Elle en sait beaucoup parce que voilà, elle avait ses enfants en prison. Donc elle se bat pour les conditions des détenus. Mais en tout cas, à cette époque-là, Reda l’a invitée à l’émission, et c’était vraiment pour elle une priorité de venir à l’émission Survivre au sida. Même si les grosses chaînes se ruaient sur elle, elle était là, en personne, alors que pour d’autres émissions elle aurait pu, elle était présente seulement par téléphone si elle n’était pas disponible. Pour le Comité je pense qu’elle y tenait beaucoup et elle était présente aussi pour la journée mondiale de lutte contre le sida quand on lui a demandé de faire l’ouverture sur le sujet de la génération sacrifiée en banlieue, elle était présente. Donc, on pouvait compter sur elle et c’est, bien sûr pour le Comité et pour moi-même très touchant qu’elle soit décédée, ça me touche beaucoup.

Sandra : Pour rappel, le Comité des familles, association créée et gérée par et pour des familles vivant avec le VIH. Ousmane, toi aussi tu as connu Catherine Charles.

Ousmane : Oui. Moi je l’ai connu. Je pense, la rubrique culturelle, à la toute première rubrique culturelle que j’ai faite sur l’émission Survivre au sida c’était avec justement Catherine où elle et moi nous avons lancé, on a relu la lettre de Madeleine pour attirer l’attention du ministre de la Santé sur le projet Madeleine. Je pense que, quand même là-dessus, elle a eu à dire que voilà, elle était prête pour aller jusqu’au bout pour qu’enfin le projet Madeleine soit reconnu comme un projet et à fond. Moi j’ai appris le décès depuis le Burkina, puisque bon, moi je suis rentré que samedi matin. On m’a appelé vendredi soir et on m’a annoncé son décès et franchement ça m’a beaucoup touché et j’avais que hâte, de venir et de pouvoir reparler d’elle aujourd’hui comme une personne qui a toujours été là surtout pour ses enfants en premier lieu et aussi pour toutes les personnes concernées par le VIH. Que ce soit en pénitencier ou que ce soit dans la société en général.

Sandra : Tu parlais du projet Madeleine. Tout le monde ne connaît pas. Est-ce que tu peux expliquer en quelques mots ce que c’est ?

Ousmane : Le projet Madeleine c’est un projet qui est né d’une grande dame malheureusement qui nous a aussi quittés du nom de Madeleine. Donc qui avait décidé de faire de la prévention en témoignant de sa vie avec le VIH. Plus tard après son décès le Comité a décidé de ne pas laisser tomber et de pouvoir continuer ce combat-là et de faire cette prévention dans les collèges et lycées avec les personnes concernées, justement en témoignant de leur vie avec le VIH pour qu’enfin l’histoire ne se répète pas.

Transcription : Sandra Jean-Pierre

Hommage à une combattante : Charles-Catherine Claude

- Hommage à une combattante (1/8) : Sérovolution
- Hommage à une combattante (2/8) : Des compagnons croisés sur le chemin du combat pour survivre au sida
- Hommage à une combattante (3/8) : « Le sida à deux vitesses, il y en a qui a des CD4 à base de paillettes et l’autre qui est en train de crever dans la rue. »
- Hommage à une combattante (4/8) : Veiller à défendre équitablement toutes les populations sur le front du sida
- Hommage à une combattante (5/8) : Fraternité à perpète, contre les prisons et l’enfermement
- Hommage à une combattante (6/8) : Catherine vs. Carla
- Hommage à une combattante (7/8) : Naissance et sacrifice
- Hommage à une combattante (8/8) : Allô, Sida Info Service