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Hommage aux disparus | Mémoire de la colonisation | Pouvoir médical

Hommage aux disparus du sida en banlieue : Une maman souchienne réagit

8 juin 2008 (lemegalodon.net)

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Cet article est une contribution au débat autour de la mémoire de l’hécatombe du sida dans les quartiers pauvres. Lire Séropo et Indigène : Cocktail destructif !.

S’il s’agit d’écouter les survivants de la génération toxico, peut-être faut-il les écouter tous. Et aussi, ne pas plaquer a posteriori une seule analyse, une seule causalité sur leur histoire.

Dire que la colonisation, et ses suites est une partie du problème, c’est juste. En faire la grille principale d’analyse, ça me semble tout simplement faux et contradictoire avec ce que portait la jeunesse des quartiers et d’ailleurs dans ces années là, la domination qu’elle a subie, mais aussi ses rêves et ses révoltes.

Ce que cherchait à détruire le pouvoir dans ces années là, ce n’est pas seulement la lutte contre le racisme, contre les crimes policiers, mais aussi tout ce qui restait des utopies en actes des années 70, mais aussi cette révolte inconditionnelle contre toutes les formes d’oppression économique, sociale, religieuses, familiales. Dans cette révolte, se sont retrouvés des jeunes issus de l’immigration, mais aussi beaucoup de jeunes souchiens, comme vous dites, pourquoi pas, ça sonne pas si mal. Mais aussi beaucoup de ces moitié-moitié, moitié petits enfants de colonisés, moitié petits enfants de colon.

Génération du béton, génération sans mémoire, ni celle des luttes de ce pays, ni celles des luttes de leurs parents africains ou maghrébins. Génération laissée à elle même par les militants de partout, et dont la révolte a effectivement été brisée par tous les moyens nécessaires, de la répression à la came.

Ce que je n’aime pas, chez les Indigènes, c’est encore une fois cette construction a posteriori de l’Histoire par ceux qui ont les moyens intellectuels et matériels de l’écrire.

Si aujourd’hui la ségrégation et la racialisation de l’espace urbain sont achevées, il ne faudrait pas oublier que ce n’était pas le cas jusqu’à la fin des années 80 et même un peu au delà, et que les pauvres de toutes origines y vivaient ensemble. Que toute une génération a rejeté toute appartenance communautaire, et que ça chauffait autant à la maison pour ceux qui trainaient avec des Français que pour les français qui avaient des parents au Front ou au Pc d’ailleurs. Il ne s’agit pas de dire que les jeunes issus de l’immigration ne subissaient pas une oppression bien plus grande au niveau social et économique mais qu’il y a eu une tentative, un rêve d’y résister ensemble, à partir du grand néant idéologique, du désert des luttes collectives de ces années là.

J’ai pas l’impression que cette dimension là apparaisse dans ce texte, et pourtant elle est fondamentale, elle est un fait qu’on ne peut pas éluder sans réduire encore une fois les morts au silence.

Bien sûr on peut critiquer ce rêve commun, on peut même dire que les jeunes issus de l’immigration auraient mieux fait de se rattacher à leur histoire, auraient mieux fait de ne pas oublier, on peut aujourd’hui tenter une autre hypothèse.

Mais ça n’empêche pas qu’une génération de pauvres a lutté, a souffert, et a pris de plein fouet l’épidémie ensemble.

Maman souchienne, père indigène, et nique sa mère la réinsertion, de toute façon