Droits des femmes | Marta Maia | Pouvoir médical
Les déterminants sociaux de la maladie
29 janvier 2007 (lemegalodon.net)
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La condition de femme et le statut de migrant peuvent constituer des facteurs aggravants dans le vécu de la maladie. En effet, le degré de vulnérabilité et de précarité des femmes et des migrants est plus important que celui de la population en général.
par Marta Maia [1]
D’une part, un rapport de force inégal caractérise les relations entre les femmes et les hommes. Les femmes sont obligées de répondre à des idéaux culturels contraignants, telles que la virginité pour celles qui ne sont pas mariées et la maternité pour celles qui le sont ; elles ont plus difficilement accès à l’information ; elles sont plus souvent aux prises avec la vulnérabilité financière, parfois amenées à se prostituer, et avec la violence.
D’autre part, le lien est démontré entre le statut de migrant et des facteurs de vulnérabilité, tels les conditions de vie précaires, la rupture des liens sociaux et le dysfonctionnement de l’organisation sociale à l’échelle globale. Il en est de même en ce qui concerne le lien entre la mobilité humaine et le développement des épidémies dans le monde. Ignorer cette réalité peut faire le jeu de l’épidémie. Par exemple, l’épidémie de VIH (virus de l’immunodéficience humaine) parmi les populations immigrées a longtemps été occultée pour éviter la discrimination alors qu’elle y est plus importante que pour la population en général et alors que la prévention auprès de ces populations, ainsi que la lutte contre les discriminations, exige une connaissance précise de la situation sociale, économique et épidémiologique de ces groupes.
Mais la vulnérabilité des populations immigrées face à la maladie ne tient pas tant à des spécificités culturelles qu’à une situation de précarité économique et sociale plus ou moins importante dans laquelle vivent ces populations. Par ailleurs, à statut socio-économique égal, les étrangers sont victimes de formes de discrimination spécifiques, liées notamment aux comportements racistes qu’ils subissent et à leur méconnaissance des institutions, qui rend l’accès aux soins plus compliqué.
Au-delà du fait qu’elles ont d’autres préoccupations qui leur semblent prioritaires (logement, nourriture, emploi, statut légal, etc.), les personnes migrantes peuvent craindre la discrimination et le manque de confidentialité ou, notamment pour les migrations récentes, ignorer les procédures d’accès aux soins. Ainsi, bon nombre de personnes ne se font pas dépister.
Les populations précaires sont les plus vulnérables, les plus exposées à la maladie. Les motifs d’angoisse découlant de la précarité renforcent les comportements à risque et la maladie peut à son tour devenir un facteur de précarité. D’abord, des effets de sélection, notamment dans le monde du travail, s’exercent vis-à-vis des personnes malades ou fragiles. Ensuite, la maladie implique un investissement accru en temps, en énergie et en argent. On peut donc également affirmer qu’un mauvais état de santé conduit à un abaissement du niveau socio-économique.
Les migrants, perçus surtout comme force de travail et dont le projet migratoire est basé sur la recherche d’un travail, éprouvent d’autant plus amèrement l’assimilation qui est faite dans les représentations sociales, entre santé et capacité de travail, entre maladie et incapacité. En raison de capacités physiques qui leur échappent, ils perdent leur statut d’être actif dans la société sur lequel repose la valorisation de soi, pour un migrant plus que pour les autres individus, puisque, d’une manière générale, il tire de là la légitimité de sa présence en sol étranger. Le corps, image de cette incapacité, devient l’expression d’une contradiction entre ce que la société attend de l’immigré et l’impuissance de ce dernier à y répondre.
Le contexte social a donc souvent un poids prépondérant, décisif dans le vécu de la maladie. Prendre soin de sa santé est un ensemble de comportements qui dépendent en grande partie des ressources et des contraintes diverses de la vie d’un individu, qui sont liées au travail, au revenu, à la vie familiale, à l’estime de soi, etc.
Les individus des classes défavorisées, qui sont les plus vulnérables face à la maladie (car plus vulnérables au risque professionnel, au chômage qui suscite l’angoisse et la précarisation matérielle, et à l’alcoolisme, moins attentifs à l’hygiène de vie et peu enclins au recours aux soins à titre préventif, etc.), donc ceux qui auraient le besoin le plus pressant de recourir aux soins, sont également ceux dont la propension à se soigner est la plus faible. Or les immigrés font, en général, partie de ces groupes d’individus. La littérature internationale montre que ce n’est pas tant la nationalité qui est pertinente en ce qui concerne les attitudes face à la maladie et aux soins que les conditions du projet migratoire ou les expériences de stigmatisation.
Quelques études font état de corrélations statistiquement significatives entre la fréquence d’expériences vécues de discrimination et celle d’états de santé détériorés (dépressions, troubles psychologiques, maladies cardio-vasculaires, etc.) ou de non-recours aux soins. La question des enjeux de la solidarité publique se pose alors vis-à-vis des populations les plus vulnérables.
Les sensations corporelles et les états physiologiques, le style de plainte et la nature de l’angoisse, l’intérêt accordé aux différents organes et parties du corps, enfin ce qui est défini ou pas comme une maladie, sont en partie interprétés en fonction des contextes culturels dans lesquels ils se produisent et en référence à des schèmes culturels précis. Par exemple, dans certaines sociétés traditionnelles, la maladie est souvent interprétée comme le résultat de la volonté de nuire d’un individu, d’un sorcier, d’un ancêtre, d’un esprit ou d’une divinité. Mais dans le contexte migratoire, l’argument évoquant des habitudes culturelles, que l’on a entendu au début de l’épidémie, selon lequel certains groupes courent plus de risques de contamination par le VIH en raison de leurs pratiques, a heureusement été largement abandonné. Les facteurs socio-économiques et d’autres qui sous-tendent la vulnérabilité ont de plus en plus été reconnu et acceptés. Certes, la non-maîtrise de la langue française et la perte de repères sont des difficultés qui jalonnent le parcours des immigrés, en particulier de ceux arrivés récemment en France, mais les facteurs de vulnérabilité des migrants, à l’infection par le VIH comme à celle par le VHC, tiennent surtout au fait qu’ils se trouvent souvent dans la fraction la plus défavorisée au plan sanitaire et social. Cela implique des difficultés linguistiques et culturelles dans la compréhension des messages de prévention (ces difficultés existent aussi parmi les couches les plus défavorisées de la population non migrante, bien que, parfois, dans une moindre mesure) et des difficultés d’accès à l’information et aux soins, le plus souvent liées à une méconnaissance du dispositif de droits et de soins, et à des facteurs géographiques (distance à parcourir jusqu’à l’hôpital et coût des transports – en argent, en temps et en énergie – pour les personnes vivant loin des centres urbains). À cela s’ajoutent des réactions de déni face à la maladie par peur d’une stigmatisation accrue, voire par crainte d’être transformé en bouc émissaire. Le fait d’être migrant peut donc influer sur la prise en charge de la maladie, de même que sur le vécu de la maladie et de son traitement.
Notes
[1] Marta Maia participe à la rédaction du site survivreausida.net depuis 2004. Docteur en anthropologie sociale et ethnologie, elle a passé deux ans avec des ados de milieux très différents, les uns ("la racaille") fréquentant des lycées publics de la "zone" de Montreuil, les autres ("les bourges") des lycées catholiques de Vincennes. Elle en a tiré un livre, Sexualités adolescentes.
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ETUDIANTE EN DETRESSE :Les déterminants sociaux des facteurs de risque cardiovasculaires(alimentation activité physique,tabac obésité)
Bonjour bravo pour ce que vous je suis étudainte en médecine au cameroun je travaille sur les déterminants sociaux et comportementaux des facteurs de risque cardiovasculaires au sujet ma thèse.Je suis vraiment limitée par la documentation j’ aimerai une revue de la littérature à ce sujet VOTRE AIDE ME SERA VRAIMENT UTILE ;MERCI DE VOTRE BONNE FOI.
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Mère expulsion contre son grè par son mari au maroc
je suis mariée depuis deux ans avec un allemand et j’ai une petite fille de 8 mois.Du jour au lendemain, je me suis retrouvé sans papier, sans rien.Il m’a fait croire qu’on allait en vacances chez sa famille mais arrivée à la douane marocaine, il m’a abandonné ma petite fille et moi sans argent , sans nourriture. Si vous avez une solution pour me faire revenir en Allemagne et me dire quoi faire , veuillez me répondre !C’est très urgent