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Homosexualité | Luttes de l’immigration et contre le racisme

Les homos de banlieue, grands absents de la Marche des fiertés LGBT

22 juin 2006 (AFP)

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BOBIGNY, 22 juin 2006 (AFP) - Ils n’iront probablement pas à la marche des fiertés de samedi : les jeunes gays des banlieues, souvent issus de milieu où l’homosexualité est taboue, vivent leur sexualité dans la clandestinité et ne se reconnaissent guère dans les revendications et l’imagerie véhiculées par la "Gay Pride".

Par Stéphanie LEROUGE

"Les gays de banlieue, tu ne les verras pas à la Gay Pride : déjà, ils ont trop peur d’être reconnus au journal télévisé de 20H00", affirme Boris (prénom modifié, ndlr), 29 ans, qui a grandi à Pantin en Seine-Saint-Denis avant de rejoindre la capitale. "En banlieue, tu es obligé de te cacher".

Violences verbales, physiques, harcèlement quotidien, obligation de mener une double vie : l’association SOS Homophobie a donné un aperçu dans son rapport annuel 2006 des difficultés rencontrées par les gays et lesbiennes vivant dans des cités où l’homosexualité, mal connue, est souvent associée à la pédophilie, au sida et à l’imagerie "grande folle".

"Je n’ai jamais été considéré comme un homosexuel dans ma ville", témoigne encore Boris, fils d’immigrés russes, qui avoue avoir eu des "comportements homophobes" par "frustration psychologique". "C’est une terrible souffrance de savoir que tout ce que tu es est rejeté par ton environnement. Quand, j’ai commencé à m’assumer, vers 17-18 ans, j’ai compris à quel point il était important pour moi de quitter la cité".

Lui a du moins eu la chance de ne pas être rejeté par ses parents. Najib, 24 ans, a été frappé et mis à la porte par son père après avoir été surpris, à 21 ans, en "flagrant délit" alors qu’il avait fait venir son petit ami au domicile familial.

Exilé d’Aubervilliers à Pierrefitte, Najib est aujourd’hui "moins obligé de se cacher puisqu’il est indépendant", mais il ne se voit pas faire venir un compagnon chez lui. "J’aurais trop peur qu’on le reconnaisse comme gay".

Seule échappatoire pour les homosexuels de banlieue, venir à Paris, direction le Marais ou les soirées "Black Blanc Beur" des Folie’s Pigalle, où ils peuvent jouir d’un relatif anonymat. Mais, relève aussitôt Sofiane, 23 ans, s’il est difficile d’être homo en banlieue, "à l’inverse il n’est pas facile pour un mec de cité, avec son jogging et ses baskets, de se faire accepter dans le milieu gay".

Décalage culturel, économique, les deux mondes se "télescopent", souligne Stéphane Schibikh, qui avec son site Internet "Cité Beur" et son magazine "Wesh City", tente de donner une plus grande visibilité aux "lascars gays". "Les gays du Marais luttent pour les droits civiques, le mariage, l’adoption. Le gay de banlieue lutte d’abord pour pouvoir dire à ses parents, à ses amis, qu’il est homo", poursuit-il.

A cet égard, la "Gay Pride", "vaste carnaval" où s’affichent des pratiques sexuelles "délurées", paraît à certains contre-productive. "On veut atteindre l’indifférence en jouant la différence. Mais comment veux-tu te faire accepter si tu exhibes tes pratiques sexuelles ?", se demande Boris, qui se dit "choqué" par l’image des homosexuels que propose la Marche.

Même distance de Najib vis-à-vis du caractère communautaire et revendicatif du milieu gay. "Le premier problème, c’est que les gens ne savent pas que c’est un gay... au lieu de militer, de réclamer des lois, il faudrait informer, favoriser davantage l’échange que les revendications communautaires qui amplifient le gouffre davantage qu’elles ne le comblent".

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