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Afrique du Sud | Criminalisation des séropositifs

Les rapports sexuels risqués et la loi - un couple incompatible ?

13 décembre 2004 (IPS)

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Par Wilson Johwa

Pour les adolescents de la ville de l’est du Zimbabwe, Mutare, a disc-jockey populaire connu sous le nom de Kaiboni a pendant longtemps incarné la vie de star. Mais actuellement, son avenir est loin d’être enviable.

Le jeune homme âgé de 30 ans pourrait passer plusieurs années en prison pour détournement de mineur et transmission volontaire du VIH. Il est accusé d’avoir eu, à plusieurs reprises, des rapports sexuels avec une fille de 15 ans, et de lui avoir consciemment transmis le virus du SIDA.

Kaiboni réfute ces accusations, affirmant qu’il ignorait son statut séropositif à l’époque. Mais dans une déposition faite contre lui, un médecin a attesté que le disc-jockey avait été informé de sa séropositivité en 1999, après avoir fait un test de dépistage du VIH.

Les citoyens de Mutare ont été fascinés par le procès depuis qu’il a commencé il y a plusieurs mois.

Mais pour des militants anti-SIDA, les audiences du tribunal équivalent plus à un théâtre humain fascinant. Elles focalisent également l’attention sur l’efficacité d’une loi qui interdit aux personnes séropositives de s’engager consciemment dans un comportement sexuel qui pourrait conduire à l’infection de leurs partenaires.

En 1998, le Zimbabwe a criminalisé la transmission volontaire du VIH, définie comme le fait de ne pas révéler son statut ou de ne pas prendre des précautions pour empêcher la transmission du SIDA (environ un quart des 12 millions d’habitants du pays sont infectés par le VIH).

"Le délit peut également être commis au sein du mariage", déclare le professeur Julie Stewart de la faculté de droits de l’Université du Zimbabwe.

Très peu de cas de transmission volontaire ont été toutefois dévoilés. Ceux qui ont fait l’objet d’attention ont, pour la plupart, été découverts au cours d’investigations sur des rapports sexuels non consensuels où des magistrats sont autorisés à demander que la victime fasse un test de dépistage du VIH.

La plupart des gens, semble-t-il, ne savent pas qu’ils ont un recours contentieux lorsque leur partenaire les expose consciemment au risque de contracter le SIDA - ou sont simplement peu disposés à intenter une action légale.

Les organisations, qui représentent des personnes séropositives, sont souvent opposées à la criminalisation du comportement sexuel qui comporte le risque de la transmission du VIH. Elles disent que ces personnes n’ont pas nécessairement l’intention de mettre en danger la vie de ceux avec qui elles ont des rapports sexuels - et que leurs actions peuvent provenir de la peur, du rejet ou de l’ignorance.

"La transmission volontaire n’est pas quelque chose qui arrive régulièrement et sa crainte est souvent avancée par la société pour diaboliser les personnes vivant avec le VIH, ou pour accroître la peur des personnes vivant avec le VIH", souligne Marlise Richter, un chercheur du projet de Loi sur le SIDA au Centre d’études juridiques appliquées. Le centre fait partie de l’Université de Witwatersrand, qui est basée à Johannesburg, la capitale économique d’Afrique du Sud. Dans un rapport intitulé ’Droit pénal, santé publique et transmission du VIH’, le Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) s’est également prononcé contre l’utilisation du droit pénal pour traiter de la transmission du VIH.

L’ONUSIDA indique que la criminalisation peut créer une illusion de sécurité parmi les personnes qui ne sont pas infectées. Il estime également qu’étant donné que la transmission du VIH survient souvent lorsque les gens ne savent pas qu’ils sont infectés, une interdiction volontaire serait en grande partie impertinente. Selon Sophie Dilmitis, responsable de ’Choose Life Trust’ basé à Harare, la criminalisation sert en outre à aggraver les préjudices entourant le SIDA. "Cela accroît les craintes des gens à se faire dépister et en ajoute à la honte liée au fait d’être séropositif", note-t-elle.

Aussi, qu’en est-il des cas où des Zimbabwéens ayant une forte intuition d’avoir le SIDA - même s’ils n’ont pas encore subi le test de dépistage ? Les lois du pays prévoient-t-elles des possibilités de poursuites contre ces individus, dans l’hypothèse où ils transmettraient le VIH ?

"Ceci pose la question de savoir si une suspicion - si forte soit-elle - que vous êtes séropositif ou que vous avez le SIDA suffirait (au tribunal)", demande Steward. "La réponse est probablement non".

Mais même si plusieurs zones "d’ombre" surgissent lorsque des pays légifèrent contre la transmission volontaire du VIH, plusieurs Etats en Afrique australe ont continué à faire pression pour que de telles lois soient votées. La région est considérée comme l’épicentre de la pandémie du SIDA dans le monde entier : un autre pays en Afrique australe, le Swaziland, a actuellement le plus fort taux de prévalence du VIH au monde (38,8 pour cent).

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L’Afrique du Sud, qui a plus de séropositifs que n’importe quel autre pays (5,3 millions) est une exception à cette tendance juridique - même si les choses pourraient changer.

"A l’heure actuelle, les législateurs sud-africains réfléchissent, pour leur part, à la question de savoir si un crime spécifique au VIH devait être ajouté au projet de loi sur les délits sexuels", indique Richter..

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