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Le silence des sacrifiés du sida
14 janvier 2004 (lemegalodon.net)
Ceux qui n’ont pas la parole, vont-ils la prendre ?
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Nous ne sommes pas dupes, n’est-ce pas, du « système » qui nous condamne et nous réduit au silence et en notre état. Nos cris, nos révoltes étouffées, nos dires, nos écrits en sont garants puisqu’ils en prennent un grand soin en les rangeant dans des compartiments les uns le long des autres, tout en laissant leurs auteurs de côté. On ne voudrait tout de même pas être considérés à part entière, non ?
Une tribune libre de Solenco
Ou plutôt si, mais à une seule condition, que nous nous contentions de leur raconter nos vies, mais pas plus ! Règle rigoureuse, douloureuse et fatale, sous son aspect de tolérance, car, qu’est-ce qui est imposé sous et par cette règle ?
Tout d’abord le vécu de « ce séropo » ne doit apparaître que comme une « aventure singulière », une histoire qui ne peut être que personnelle. Qui ne peut arriver que par suite d’une fatalité ou d’une démesure, si l’individu s’y trouve pris c’est sans doute parce qu’il les a provoquées, ou par une sorte de faiblesse, ou par un « hasard malchanceux » ou bien encore souhaitées par un obscur désir…
Beaucoup de hasards et « malchance » pour devenir séropo », beaucoup de faiblesse pour commettre le délit de contamination, mais beaucoup trop de lâcheté du côté de ceux qui n’osent s’avouer coupables d’une absence de prévention efficace spécifique. Beaucoup trop grave d’accepter, de vouloir encore aujourd’hui, se rendre compte de cette implacable réalité. Beaucoup trop facile de criminaliser et condamner « ce séropo ».
Les « actes criminels » (les contaminations) dans les années qui viennent risquent d’exploser et les condamnations éventuelles n’y changeront rien, bien au contraire, puisque leurs auteurs, se sachant séropositifs au dépistage anonyme, retarderont jusqu’à l’extrême limite la déclaration officielle de leur sérologie.
N’est-il pas aisé de faire croire au grand public qu’il y aurait des bons et des mauvais séropositifs ? N’est-il pas criminel de lâcher dans la nature des milliers de personnes, pour cause de droit à la différence ou à l’indifférence ? Évidemment, on laisse à quelques-uns une possibilité d’expression qui leur forge un alibi parfait auprès de l’opinion publique plus ou moins informée.
Ainsi se trouve établi que « ce séropo » ne peut avoir de pensées puisqu’il ne doit avoir que des souvenirs. Sa mémoire seule est admise, non ses légitimes requêtes… Derrière son désespoir, rien de plus que d’inévitables circonstances uniques, sans qu’il puisse y avoir en cela un « sens communicable ou une Vérité qui pourrait être celle de plusieurs ». Sa maladie ne serait, pour lui, non pas être pensée, mais seulement vécue et rappelée…
On peut tolérer sa simple mémoire mais surtout pas admettre le système qui l’a produit. Ainsi se trouve admis aujourd’hui encore, que « ce séropo » sera toujours seul.
Il peut y avoir des milliers de « compagnons de misère », mais il n’aura été lié avec eux que par une conjonction de hasards ou de fatalité commune, mais de toute façon chacun d’eux aura été « seul à plusieurs ». Leurs souvenirs, leurs vécus peuvent bien se croiser, se recouvrir, ils resteront toujours les souvenirs et les vécus de « l’un ou de l’autre ».
Il n’est donc pas question qu’ils puissent tenir ensemble un seul et même discours qui serait « collectivement le leur » et où ils pourraient dire, non pas ce qu’ils ont subi hier, mais ce qu’aujourd’hui ils pensent !
Aujourd’hui une très large majorité silencieuse, parce que bâillonnée, se trouve sacrifiée sur l’autel de lobbies avides de pouvoir autant obscurs que financiers. Il est vrai aussi, que dans cette majorité, certains se contentent de pleurer sur leur sort ou se complaisent dans un assistanat indigne et chronique.
J’entends déjà les phrases toutes faites et la colle irritante des étiquettes que l’on me colle au front. Arguments fallacieux et intimidants proférés par cette nouvelle espèce de « dictateurs modernes et démocratiques » qui veulent diriger le monde…
J’en accepte le prix à payer et en assume les conséquences. Et vous ? Êtes-vous prêts à prendre la parole ?
Forum de discussion: 4 Messages de forum
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Le silence des sacrifiés du sida
Bonjour,
Je me prénomme Patrick, né en banlieue Parisienne fin des années 1950, J’ai été héroïnomane de 1973 à 1992. Nous avons appris la nouvelle de nos contamination respectives par le V.I.H ainsi que par le virus de l’ hépatite C ; en 1986 suite au déménagement des hotels Parisiens vers la Seyne/Mer (83). Je précise qu’ à cette époque je vivais en concubinage et un fils né tout récement le 29/12/1985, à l’hopital "Jean Verdier" de Bondy (93). C’est donc six mois plus tard en faisant le transfert du carnet de santé de notre fils par le centre de P.M.I de la Seyne/Mer que nous découvrions la vérité sur notre état de santé ; car l’hopital ou notre fils est arrivé au monde nous avais tout simplement caché les informations suivantes : Mon amie était séro-positive au V.I.H ainsi qu’à l’ Hépatite C ; notre fils etait donc né "séro-positif", quand à moi j’étais séro-positif à l’Hépatite C, mais pas encore au V.I.H. Quelle surprise !! mon amie ne s’ en remettra pas moralement et tous les soirs elle répétait que nous allions mourrir, etc.... C’est ainsi qu’un soir je m’injectais un peu de sang de mon amie ! Résultat en Août 1986, suivi par un hopital de Toulon, j" étais devenu séro-positif au V.I.H ; la bonne nouvelle est que notre petit bonhomme fait une "rétro-conversion" et apparaît "séro-négatif" pour la première fois. Ensuite tous ses examens seront négatifs. Aujourd’hui, il a 19 ans et est en bonne santé. Ce n’est pas le cas pour sa mère qui décède le 27/11/1988, d’ une "pneumosistose" foudroyante. Je tiens à préciser que malgré ma peine et ma tristesse, j’ai eu le droit à une perquisition effectuée par les flics et inspecteurs de la Seyne/Mer (83) et je me suis retrouvé en "garde à vue" dans l’attente des résultats de l’autopsie du corp de mon amie défunte ! Mon casier judiciaire n’étais pas blanc, loin de là !! Bref ! j’avais la haine, la rage ... !après 36 heures les résultats de l’autopsie tombaient : DCD de mort naturel suite à la "pneumosistose" ; Ils étaient mals dans leurs chaussures les policiers du commissariat de la Seyne/Mer ; je refusais de sortir histoire de me défouler les nerfs sur leurs faces de rats. Ensuite j’ai traversé une période ou je plonge de plus belle dans les exès de consommation de drogues ! C’est avec la mise en application de la substitution(enfin !) en 1995 et la distribution de la "Méthadone" que je me sais sauvé du cauchemare de " l’addiction à l’ héro " ; c’est également dans un centre Parisien de distribution de méthadone que je rencontre ma nouvelle compagne et future femme, et cela en constatant notre passion commune pour l’informtique, sans parler du reste ... !! Concernant notre sexualité, après avoir longuement discutés, l’ élue de mon coeur décide que nous fassions l’ amour sans préservatifs ; après une année elle devient séro-positive au V.I.H, mais elle à déjà contractée l’ Hépatite C en 1992. 2004 : Nous nous aimons toujours, somme tout deux Techniciens de deuxième niveaux dans nos spécialités informatiques respectives. La vie est belle mais il ne faut jamais baisser les bras (psychiquement) car cela revient à accepter la mort ; toujours etre battant ! NOTE IMPORTANTE : J’ai toujours refusé de prendre les traitements médicamenteux depuis le début de cette histoire et mon amie fait la même chose depuis que plusieurs médecins spécialistes du V.I.H ont confirmés que j’avais eu raison car les traitements en question affaiblissent le système imunologique.
BON COURAGE
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> Le silence des sacrifiés du sida
Bonjour Patrick,
Ton histoire est tragique... Mais pour qu’elle ait, dirais-je "plus de poids", pourrais-tu nous donner les noms des médecins de l’époque qui exerçaient à l’hôpital Jean Verdier de Bondy et SURTOUT les noms des médecins spécialistes qui ont confirmé le fait que tu avais raison de ne pas prendre de médicaments ?
Merci par avance solenco
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> Le silence des sacrifiés du sida
bonjour ton parcour difficile mais tu as pris le dessus sur ce foutu virus je pense que tu as raison par rapport au traitement sauf que l avis de chaque medecin est different moi il y a dix ans je refusais tout traitements j ai tenu 6ans sans medicaments puis une premiere grossesse et la le doc de l hopital bichat me dit tritherapie ou un enfant malade mon fils ne seronegatif moi je suis creve avec ce traitement je jette les medocs a la poubelle tout va pour le mieux pendant plusieurs mois mais comme mon organisme a manger tout ces trucs je crois qu il a du s habituer refatigue un zona m envoit a l hosto le medecin me reconseille de prendre vite un traitement les cd4sont en dessous de 1OO dure l observance de se nouveau traitement j arrete je reprends 1ans sans rien avaler puis nouvelle grossesse 2bebes dans mon ventre encore un traitements aujourd hui j en ai marre de tout ces medocs la question que je me pose c est maitenant si j arrete tout est ce que je vais forcemment developper un sida en tout cas merci pour ton temoignage pleins de bonnes choses a toi et ta femme sylvie
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> Le silence des sacrifiés du sida
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> Le silence des sacrifiés du sida
Bravo, j’applaudis des deux mains car j’ai cette chance. Je suis convaincu que la raison finira par l’emporter. Juste une faute de grammaire : saurait et non serait, en l’occurrence.
Pour en sortir, il faut ne pas y entrer, et encore moins pire : le vouloir voire l’espérer.
Vi vi.